1848 : Joris-Karl Huysmans, écrivain français († 12 mai 1907).
Joris-Karl Huysmans [ɥismɑ̃ːs]1, de son vrai nom Charles Marie Georges Huysmans, est un écrivain et critique d'art français, né le 5 février 1848 à Paris et décédé le 12 mai 1907 à Paris en son domicile du 31 rue Saint-Placide.
Huysmans naît au no 11 (actuel 9) de la rue Suger dans le VIe arrondissement de Paris, d'un père néerlandais du nom de Godfried Huysmans, lithographe de profession et d'une mère française, Malvina Badin, maîtresse d'école. Il passe toute son enfance dans cette maison. Il fit toute sa carrière au ministère de l'Intérieur, où il entra en 1866.
En tant que romancier et critique d’art, il prit une part active à la vie littéraire et artistique française dans le dernier quart du xixe siècle siècle et jusqu’à sa mort, en 1907.
Défenseur du naturalisme à ses débuts, il rompit avec l’école littéraire créée par Émile Zola pour explorer les possibilités nouvelles offertes par le symbolisme et devint le principal représentant de l’esthétique fin de siècle. Dans la dernière partie de sa vie, il se convertit au catholicisme et renoua avec la tradition de la littérature mystique et fut ami de l'abbé Mugnier.
Par son œuvre de critique d’art, il contribua à lancer en France la peinture impressionniste comme le mouvement du symbolisme et permit au public de redécouvrir l’œuvre des artistes primitifs.
En 1874, Huysmans fait paraître à compte d'auteur un premier recueil de poèmes en prose intitulé Le Drageoir aux épices. Il s’agit d’un mélange hétéroclite de pièces de prose poétique, où l’auteur rend hommage aux peintres hollandais et flamands (Rembrandt, Rubens, Adriaen Brouwer, Adriaen van Ostade, Cornélius Béga…) et à la poésie de François Villon. Si cette œuvre de jeunesse laisse encore deviner l’influence marquée du romantisme – Gaspard de la Nuit d’Aloysius Bertrand – ou de la poésie moderne – les Petits poèmes en prose de Baudelaire –, elle témoigne cependant déjà d’un véritable talent d’écrivain réaliste et d’un intérêt marqué pour l'esthétique naturaliste développée à la même époque par Émile Zola.
En 1876, Huysmans publie son premier roman, d'inspiration ouvertement naturaliste, Marthe, histoire d'une fille, qui a pour thème la vie et les déboires d’une jeune parisienne contrainte par une société cupide et sans scrupules à aller jusqu'à se prostituer pour survivre. Craignant la censure qui sévit alors en France, Huysmans fit d’abord éditer ce roman à Bruxelles.
La même année, il se lie d'amitié avec Émile Zola, dont il prend ouvertement la défense dans un vibrant article consacré à son dernier roman, L'Assommoir. Cet article restera dans l'histoire de la littérature comme un des tout premiers manifestes en faveur du naturalisme.
Son deuxième roman, Les Sœurs Vatard, qui suit également la veine naturaliste, paraît en 1879, accompagné d'une dédicace à Zola, qu’il reconnaît comme son maître en littérature.
Dès lors, Huysmans appartient au petit groupe des jeunes écrivains reçus par Zola dans sa villa de Médan. Il y fréquente Guy de Maupassant, Léon Hennique, Henry Céard, avec lesquels il collabore, en 1880, à la publication, sous l’égide de Zola, du recueil collectif de nouvelles naturalistes intitulé Les Soirées de Médan, dans lequel il insère Sac au dos, un récit ironique et antipatriotique de son expérience de civil mobilisé durant la Guerre de 1870.
En ménage, roman publié l’année suivante, et surtout À vau-l'eau, une longue nouvelle parue en 1882, peignent les existences ternes et sans saveur d’anti-héros usés par « cette vie moderne atroce2 », et dont les idées noires sont imbibées des préceptes pessimistes de Schopenhauer.
Huysmans gardera de cette période une puissance d'évocation exceptionnelle dans ses descriptions architecturales, comme le Cycle de Durtal en témoigne dans les nombreuses pages consacrées aux édifices religieux.
En publiant À rebours en 1884, Huysmans rompt brutalement avec l'esthétique naturaliste. Les « tendances vers l'artifice3 » de son héros, des Esseintes, son rejet de la modernité, ses goûts décadents, ses manières de dandy excentrique et ses caprices d’esthète enthousiasmeront les lecteurs et en particulier la « jeunesse artiste4 » qui se reconnut dans l’esthétique fin de siècle créée par Huysmans, lequel avait su faire la synthèse des influences morbides de Baudelaire ou d’Edgar Poe, des propensions au rêve exprimées par les poèmes de Stéphane Mallarmé ou les tableaux de Gustave Moreau, et du réalisme exigeant des œuvres de la littérature latine de l’époque de la décadence romaine.
Roman total intégrant au cœur de la narration romanesque des réflexions sur l’art et la littérature, À rebours reste une œuvre à part dans l’histoire de la littérature et une expérience romanesque jamais réitérée par son auteur. En cherchant à ouvrir, par ce roman, une voie nouvelle dans la littérature pour échapper à l’impasse du naturalisme, Huysmans en vient à s’interroger personnellement sur la question de la foi. En effet, le roman se terminait sur ces mots : « Seigneur, prenez pitié du chrétien qui doute, de l'incrédule qui voudrait croire, du forçat de la vie qui s'embarque seul, dans la nuit, sous un firmament que n'éclairent plus les consolants fanaux du vieil espoir3 ! »
Estimant qu’un roman, pour intéresser le lecteur, doit mêler à la narration des « documents avérés5 », Huysmans entreprend, dans Là-bas (1891), d’étudier le phénomène dusatanisme en partant du cas historique de Gilles de Rais et en poursuivant son sujet jusque dans ses manifestations contemporaines. Il se documente en assistant à une messe noire, fréquente les milieux ésotériques, s’initie à la kabbale et se plonge dans l’étude du symbolisme et de l’occultisme.
Là-bas marque également la première apparition dans son œuvre du personnage de Durtal, sorte de double romanesque de Huysmans lui-même, qui revient dans ses trois romans suivants, dont l’ensemble forme une suite romanesque désignée sous le nom de Cycle de Durtal
.
Huysmans est également l’auteur d’une œuvre de critique littéraire importante11. Ses écrits sur la littérature, dont la production s’étend de 1876 à 1904, prennent tantôt la forme de chroniques littéraires, de comptes rendus d’ouvrages ou d’études d’œuvres (L’Assommoir de Zola, Gamiani de Musset), tantôt la forme de portraits d’écrivains (Baudelaire, Flaubert,Maupassant, Edmond de Goncourt, Mallarmé, Barbey d’Aurevilly, Villiers de l’Isle Adam…), de préfaces (Rimes de joie de Théodore Hannon ; Le Latin mystique de Rémy de Gourmont ; Poésies religieuses de Verlaine…), voire de réflexions sur la littérature intégrées sous forme digressive à l’intérieur de ses propres romans.
S’il reproche à la littérature latine classique sa sécheresse stylistique (Virgile, Tite-Live, Horace, Tacite…), Huysmans rend toutefois hommage à certains poètes mineurs dont la lecture lui paraît plus stimulante : Pétrone, Lucain, Apulée ou Tertullien... S’il condamne la littérature française classique (dont il ne sauve guère que Pascal), tout comme le mouvement du Romantisme (au premier rang desquels il fustige Hugo, Lamartine et Mérimée), c’est pour mieux défendre par contraste la littérature moderne, depuis Baudelairejusqu’à Zola, dont Huysmans sera d’ailleurs, dès 1876, un des premiers défenseurs et disciple.
Très tôt, en effet, Huysmans s’engage dans la défense du mouvement Naturaliste, aux côtés des premiers disciples d’Émile Zola avec lesquels il participera au recueil collectif des Soirées de Médan (1880).
Dans le milieu des années 1880, Huysmans apporte son soutien au courant Symboliste (Barbey d’Aurevilly, Villiers de l’Isle-Adam, Rémy de Gourmont…) en contribuant notamment à faire connaître du public les œuvres deMallarmé.
Enfin, postérieurement à sa conversion au catholicisme, ses intérêts le portent vers des auteurs catholiques (Ernest Hello) ou des œuvres plus spécifiquement religieuses, telles Lourdes de Zola ou les Poésies religieuses deVerlaine.
source principale : wikipédia
Bibliographie
rongés / tentation de lire...
- Le Drageoir aux épices (recueil de prose poétique, 1874).
- Marthe, histoire d’une fille (roman, 1876).
- Les Sœurs Vatard (roman, 1879). Ses narines étranges flairaient en frémissant ce qu'il y a de nauséabond dans le monde. L'écoeurant fumet des gargotes, l'âcre encens frelaté, les odeurs fades ou infectes des bouges et des asiles de nuit, tout ce qui révoltait ses sens excitait son génie. On eût dit que le dégoûtant et l'horrible dans tous les genres le contraignissent à les observer, et que les abominations de toute espèce eussent pour effet d'engendrer un artiste spécialement fait pour les peindre dans un homme créé spécialement pour en souffrir. Paul Valéry
- Sac au dos (nouvelle parue dans Les Soirées de Médan, 1880). Romancier, critique d'art, auteur de poèmes en prose, Huysmans a également donné dans le récit bref. Cette édition lui rend justice en réunissant l'ensemble de ses nouvelles. Celles-ci sont tout sauf des histoires "extraordinaires" : l'auteur se place sur le terrain de la chronique, au ras des menus événements. Ses personnages sont des héros à la triste figure : soldat égaré (Sac au dos), petit fonctionnaire errant dans les gargotes de la rive gauche (A vau-l'eau) ou en proie aux rituels de l'administration (La Retraite de Monsieur Bougran), jeune femme à l'abandon sur laquelle s'acharnent les représentants du sexe fort (Un dilemme)... Pour contrecarrer les vicissitudes de l'existence, celui qui a inventé l'expression "humour noir" mobilise les drôleries saumâtres du désenchantement. Prenant le parti de la transposition grotesque, il inaugure un type de récit qui sera cher à des écrivains comme Gogol, Kafka, Céline ou Beckett.
- Croquis parisiens (poèmes en prose, 1880).
- En ménage (roman, 1881).
- À vau-l’eau, nouvelle, éditions Henry Kistemaeckers, Bruxelles, 1882. À vau-l'eau, bref roman publié en 1882, décrit l'existence monotone d'un employé de bureau, Folantin, célibataire et hypocondriaque. Sa vie se résume à l'inconvénient de dîner dans de piètres restaurants, et d'aller de déceptions en déceptions culinaires. Englué dans la médiocrité de son quotidien, Folantin se révolte parfois contre son existence. Il retombe très vite dans son spleen noir. Il est l'exact revers de Des Esseintes, le célèbre personnage dandy de À rebours, qui pourtant aspire comme lui à se soustraire à l'ennui.
- L’Art moderne (critique d’art, 1883). M. Huysmans a été l'historiographe des premières campagnes impressionnistes; il a célébrécomme il convient Delacroix, Goya, Turner, Chéret, Whistler, Redon, Bartholomé ;
il a roulé les officiels dans un gluant mépris.
Ses deux livres de critique sont, pour leur sûreté de verdict et leur ferme exécution,
les seuls qui aient été faits sur l'art moderne. - À rebours (roman, 1884). La Bible de l'esprit décadent et de la " charogne " 1900. A travers le personnage de des Esseintes, Huysmans n'a pas seulement résumé, immortalisé les torpeurs, les langueurs, les névroses vénéneuses et perverses du siècle finissant. Des Esseintes est aussi un héros kierkegaardien, à la fois grotesque et pathétique, une des plus fortes figures de l'angoisse qu'ait laissées notre littérature. Fils spirituel de René et de la génération du mal du siècle, il annonce à bien des égards le Bardamu de Céline et le Roquentin de La Nausée.
- En rade (roman, 1887).
- Un dilemme (nouvelle, 1887).
- La Retraite de monsieur Bougran (nouvelle, 1888 ; pub. posthume 1964).
- Certains (critique d’art, 1889).
- La Bièvre (monographie, 1890).
- Là-bas (roman, 1891). " Partout les formes obscènes montent de la terre, jaillissent en désordre dans le firmament qui se satanise ; les nuages se gonflent en mamelons, se fendent en croupes, s'arrondissent en des outres fécondes, se dispersent en des traînées épandues de laite ; ils s'accordent avec la bombance sombre de la futaie où ce ne sont plus qu'images de cuisses géantes ou naines, que triangles féminins, que grands V, que bouches de Sodome, que cicatrices qui s'ébrasent, qu'issues humides !... et il voudrait bafouiller dans de la chair de déesse, il voudrait trucider la Dryade, la violer à une place inconnue aux folies de l'homme ! "
- En route (roman, 1895).
- La Cathédrale (roman, 1898). Tous les matins, Durtal savoure le moment délicieux où les ténèbres de la forêt tiède l'accueillent au sortir de la place que balaie l'âpre vent de Beauce. Cette forêt symbolique aux troncs séculaires, fabuleux arbres blancs dont la cime se perd dans l'ombre que n'éclaire aucune étoile, c'est la Cathédrale. Durtal est venu s'installer à Chartres sur les instances de son ami l'abbé Gévresin. N'aura-t-il pas là toute la paix qu'il cherche pour travailler à ses monographies religieuses? Ses méditations sur l'architecture. ses conversations avec Gévresin et la pieuse Mine Bavoil, l'ambiance même de Chartres l'amènent à vaincre ses doutes et son appréhension de la vie claustrale. Se fera-t-il oblat? Il part pour Solesmes. Quête de la foi qui fut aussi celle de J.-K Huysmans, dont cette oeuvre traduit les préoccupations mystiques et la profonde érudition dans le domaine de l'art gothique et roman.
- La Bièvre et Saint-Séverin (monographies, 1898).
- Les Gobelins ; Saint-Séverin (monographies, 1901).
- Sainte Lydwine de Schiedam (hagiographie, 1901).
- De tout (recueil d’articles, 1902).
- L’Oblat (roman, 1903).
- Trois Primitifs (critique d’art, 1905).
- Les Foules de Lourdes (roman, 1906).
- Trois Églises (monographie, pub. posthume 1908).
- Gilles de Rais : La Magie en Poitou suivi de deux documents inédits -La figure de Gilles de Rais n'a cessé de hanter Joris-Karl Huysmans (1848-1907). Le Moyen Age est une époque qui le fascine par sa foi profonde et ses excès. En 1897, dans une plaquette confidentielle, tirée à cent exemplaires et jamais diffusée, il présente sa vision de celui que la légende populaire a surnommé Barbe-Bleue. Retraçant un destin exceptionnel, il suit le monstre jusqu'à son procès : enfant abandonné, compagnon de guerre de Jeanne d'Arc, Maréchal de France à vingt-cinq ans, ce seigneur mystique devenu ogre et tueur d'enfants finit pendu et brûlé, en confessant ses crimes.
un livre que je pense relire cette année...
Là-bas est roman de Joris-Karl Huysmans paru en 1891. Il occupe une place privilégiée dans son œuvre puisqu'il précède immédiatement sa conversion au catholicisme. Avec ce livre, Huysmans rompt définitivement avec lenaturalisme (l'histoire s'ouvre sur une critique en règle par le héros) et met en scène pour la première fois le personnage de Durtal, véritable double de l'auteur, qui sera le protagoniste des romans ultérieurs.
Le héros Durtal, un médiocre auteur parisien, mène une enquête sur Gilles de Rais qui, au xve siècle, fut accusé d'avoir violé et torturé des dizaines d'enfants. Ces recherches exercent une étrange fascination sur madame Chantelouve, qui ne tarde pas à s'éprendre de l'écrivain et à devenir sa maîtresse. Fidèle de Satan, elle lui apprend que des messes noires continuent à être célébrées à Paris. Durtal s'initie alors au satanisme, s'entretient avec ses amis d'occultisme, d'astrologie, de spiritisme, de magie…
Excellent article ! merci
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